Arbres-habitats et bois mort n’ont pas tous la même valeur écologique

Différents facteurs caractérisent la valeur écologique du bois mort et des vieux arbres en terme de biodiversité. Ce sont l'essence de l’arbre, sa dimension, ses dendromicrohabitats, sa localisation, le microclimat qui le caractérise ainsi que le degré de décomposition du bois.

a) Essence de l’arbre

Certaines essences d’arbres sont plus riches en espèces que d’autres. Les essences à écorce rugueuse, riches en dendromicrohabitats, sont particulièrement aptes à accueillir une grande biodiversité d'insectes. La qualité du bois, différente selon l'essence d'arbre, exerce une influence sur la durée de décomposition. Selon l'essence, la décomposition peut durer environ 10-20 ans (peuplier, saule, bouleau), 30-50 ans (hêtre, pin) ou jusqu'à >80 ans (chêne). Un arbre qui se décompose lentement sera un substrat d’autant plus durable pour le développement d’espèces saproxyliques.

Parmi les arbres autochtones, les chênes et les saules sont par exemple des hôtes de choix pour les insectes, tandis que de nombreux champignons sont quant à eux associés au hêtre et à l’épicéa.

Selon le point de vue, tous les « bons » arbres n’ont pas les mêmes caractéristiques

Un arbre de grande valeur économique a un tronc droit avec le moins de branches possible. La pourriture est également, et c’est compréhensible, indésirable dans le bois. Les organismes saproxyliques, par contre, dépendent de dendromicrohabitats variés et multiformes qui se produisent rarement sur des arbres droits à couronne courte. D'un point de vue économique, un "bon" arbre est souvent "sous-optimal" d'un point de vue écologique - et vice versa.

b) Dimension de l’arbre

La dimension de l’arbre, caractérisée par son diamètre, son volume ou par sa hauteur, influence le cortège d’espèces colonisatrices. Un tronc d’arbre à large diamètre peut servir de lieu de nidification pour un plus grand nombre d’espèces.

Le volume d’une cavité de nidification est déterminé par la taille de l’oiseau cavernicole capable de creuser dans les arbres. Des petites espèces peuvent utiliser les troncs fins ou larges, alors que les grandes espèces, tel le pic noir, se cantonnent aux gros diamètres. pour en savour plus sur les espèces cavicoles

Les grands coléoptères saproxyliques, dont le développement larvaire prend plusieurs années, préfèrent également le bois mort de plus grandes dimensions. Pour ces espèces, des conditions d'habitat constantes et des nutriments suffisants sur une plus longue période de temps sont essentiels. Le manque de de bois mort de grande taille dans les forêts exploitées est l'une des principales raisons de la menace d’extinction des coléoptères saproxyliques (Seibold et al. 2015).

Le cortège des bryophytes qui se développe sur un chablis dépend du diamètre de ce dernier : les gros diamètres se décomposent lentement et sont plus longtemps disponibles comme substrats. Ils sont nécessaires à la croissance de certaines espèces considérées comme rares et qui se dispersent lentement (Anastrophyllum hellerianum, Calypogeia suecica,Odontoschisma denudatum, Scapania umbrosa). En effet, celles-ci n’ont pas le temps de se développer sur les pièces de bois mort de faible diamètre, décomposées trop rapidement. A l’inverse, la colonisation des chablis de petit diamètre par des espèces croissant sur le sol est plus rapide que celle des gros troncs.

La dimension de l'arbre joue également un rôle dans le microclimat régnant au sein de l’arbre considéré comme habitat : l'épaisseur du bois entourant une cavité détermine la régulation thermique et la protection contre des températures extrêmes. Les gros arbres morts, sur pied ou couchés, restent humides à l'intérieur, même pendant les périodes de sécheresse. Ils protègent ainsi les petits organismes contre le dessèchement.

La longévité d'un arbre mort sur pied dépend fortement de son diamètre. Dans certaines conditions climatiques, un arbre mort de grande dimension peut rester des dizaines d'années sur pied. Plus le diamètre est grand, plus la décomposition au sol sera également longue.

Nombre d’espèces et taille de l’arbre

Davantage d’espèces vivent sur ou dans les grosses pièces de bois mort que dans les branches fines. Cette relation s’explique essentiellement par la relation nombre d’espèces – aire. En général, le nombre d’espèces diminue avec la surface décroissante. Les gros arbres présentent également une plus grande diversité de dendromicrohabitats. Sur un gros tronc couché, on trouve plusieurs stades de décomposition, ainsi que des endroits humides et des endroits secs. Cela permet l’installation d’une grande variété d’espèces saproxyliques.

Pour un même volume de bois ou une superficie d’écorce similaire mais des pièces de bois mort de tailles différentes (par ex. de nombreuses branches comparées à un tronc), on trouve en général le même nombre d’espèces associées. Ceci a pu être démontré pour les champignons et pour les coléoptères. La composition des espèces, en revanche, varie beaucoup. De nombreuses fines branches ne peuvent donc pas remplacer les grosses pièces de bois mort. (Stokland et al. 2012).

c) Microclimat

Le microclimat caractérisant un vieil arbre ou un arbre mort est déterminé par la situation de celui-ci au sein de la forêt (à l’intérieur du peuplement, proche d’une lisière,…). Il influence son potentiel en matière de biodiversité car le cortège d’organismes varie selon l'exposition, la température, l'ensoleillement et le régime hydrique.

d) Localisation

La localisation du bois mort dans l’arbre (proche des racines ou dans la couronne…) détermine également le cortège d'organismes présents. (Link zu Verschiedene Formen von Totholz). Differentes formes de bois morts

e) Phase de décomposition

A chaque phase de décomposition correspond un cortège d'organismes différent. pour en savoir plus

Les meilleurs garants de la biodiversité

Une diversification de ces différentes conditions (essence, dimension…), couplée à une diversité et densité suffisantes de dendromicrohabitats sont les meilleurs garants de la biodiversité à l'échelle d'un peuplement.

Liens et documents

  • Gross, A.; Blaser, S.; Senn-Irlet, B.J., 2016: SwissFungi: Nationales Daten- und Informationszentrum der Schweizer Pilze [Datenbank]. Version 2. Birmensdorf, Eidg. Forschungsanstalt WSL. Online unter: http://www.swissfungi.ch.
  • Kennedy, C.E.J. & Southwood, T.R.E. 1984. The Number of Species of Insects Associated with British Trees: A Re-Analysis. Journal of Animal Ecology Vol. 53, No. 2, pp. 455-478.
  • Samuelsson, J., Gustafsson, L. & Ingelög T. (1994). Dying and dead trees, a review of their importance for biodiversity. Uppsala: Swedish Threatened Species Unit.
  • Seibold S, Brandl R, Buse J, Hothorn T, Schmidl J, Thorn S, Muller J (2015) Association of extinction risk of saproxylic beetles with ecological degradation of forests in Europe. Conserv Biol 29:382–390. doi: 10.1111/cobi.12427
  • Stokland, J., Siitonen, J., & Jonsson, B. (Ed.) (2012). Biodiversity in Dead Wood. Cambridge, Cambridge University Press. 509 pp.