Gestion des risques et promotion du bois mort: Exemple du canton d'Argovie

Dans le contexte du bois mort et des vieux arbres, les risques que peuvent encourir les visiteurs en forêt constituent un thème important. Comme le montre le canton d’Argovie, les aspects sécuritaires et un volume élevé de bois mort (sur pied) sont conciliables dans la pratique.

Entretien avec Erwin Städler, inspecteur forestier d’arrondissement pour Aarau-Kulm-Zofingue

Pour quelles raisons le canton d’Argovie favorise-t-il le bois mort en forêt?

La valeur écologique des vieux arbres et du bois mort est incontestable. Pour de nombreuses espèces de champignons saprophytes et de coléoptères saproxliques notamment, mais aussi pour d’autres spécialistes, leur présence en quantité suffisante est vitale, qu’il s’agisse de vieux arbres au large diamètre ou de bois mort sur pied ou à terre. Le bois mort est une composante fondamentale d’une forêt naturelle.

Comment est-il possible d’augmenter le volume de bois mort en forêt?

Dans la forêt argovienne fortement exploitée, les phases naturelles de vieillesse et d’écroulement étaient absentes de la plupart des peuplements jusqu’à ces quinze dernières années. Comme nous laissons à nouveau libre cours aux processus naturels de vieillissement et de décomposition dans les réserves forestières, le volume de bois mort augmente lentement mais constamment.

La politique forestière suisse s’est fixé comme objectif d’attribuer au moins 10 % de la surface forestière aux réserves d’ici à 2030. Les moyens d’atteindre cet objectif relèvent des cantons. Avec le programme de protection de la nature en forêt du canton d’Argovie (1996), environ 10 % de la forêt ne doivent plus être exploités d’ici à 2020. Les surfaces sont sécurisées sur le plan contractuel et bénéficient d’une indemnité financière.

Dans le canton d’Argovie, à la fin 2011, 75 % (soit 2550 ha) des réserves forestières naturelles et des îlots de sénescence ont été atteints conformément aux objectifs du programme cantonal de protection de la nature en forêt. De surcroît, nous augmentons la proportion de bois mort lors des revalorisations de lisières forestières (environ 180 km jusqu’en 2011), dans les réserves de chênaies (environ 1970 ha jusqu’en 2011) et dans les réserves forestières particulières (environ 840 ha jusqu’en 2011).

Grâce aux propriétaires de forêt qui acceptent de conclure des contrats avec le canton, la proportion de bois mort dans la forêt argovienne s’est aussi déjà nettement accrue. Selon le troisième Inventaire forestier national (relevés de 2005), les forêts argoviennes présentent en moyenne 15 m3/ha de bois mort. Dans les réserves forestières et les îlots de sénescence, cette valeur, à hauteur de 43 m3/ha en moyenne, est trois fois supérieure.

Existe-t-il des problèmes liés à la sécurité des visiteurs en forêt?

La forêt argovienne couvre un tiers de la superficie du canton et représente un espace de détente important. La population passe une grande partie de son temps libre en forêt: 80 % de la population suisse fréquente la forêt plusieurs fois par mois. Selon une enquête actuelle auprès de la population, l’acceptation de la protection de la nature en forêt est supérieure à la moyenne suisse dans le canton d’Argovie.

Au niveau des routes forestières, des installations de détente et en lisière de forêt le long des zones à bâtir, prévalent des exigences de sécurité accrues vis-à-vis des arbres morts sur pied. La responsabilité individuelle des visiteurs en forêt prime toutefois car la forêt ne vaut pas comme ouvrage, étant au contraire un "état naturel". En dehors des sentiers forestiers et dans les réserves forestières, le bois mort doit être considéré comme élément d’une forêt proche de l’état naturel.

Avez-vous recours à des mesures spéciales pour réduire le risque d’accident lié au bois mort? Par exemple le long de chemins appréciés des promeneurs?

Le devoir de surveillance appliqué à la forêt relève des propriétaires de forêt et des gardes forestiers de triage. Aux alentours des axes de transport ou en présence d’activités de loisirs importantes, le bois mort sur pied est abattu en règle générale. Si de telles mesures sont nécessaires dans les réserves forestières ou les îlots de sénescence, l’inspecteur forestier d’arrondissement est consulté au préalable.

Si un accident de personne dû au bois mort survient néanmoins dans une réserve forestière, qui est responsable: le propriétaire de forêt ou le canton?

La responsabilité n’est pas précisée de façon plus détaillée car aucun accident ne s’est produit à ce jour et la jurisprudence fait défaut. Selon la législation suisse sur les forêts, aucun devoir d’exploitation ne s’applique à la forêt.

Merci beaucoup de cet entretien.

La forêt argovienne

Vous trouverez des informations exhaustives concernant la forêt argovienne sur le site Internet du canton. Les thèmes y sont variés: droit forestier cantonal, autorisations de défrichement, soins aux jeunes peuplements, protection des sols, espace de détente, protection de la nature, etc.

Des cartes en ligne sont également disponibles sur les thèmes suivants: triages forestiers, associations végétales, surfaces forestières et réserves forestières naturelles.